... Je suis comme
Camille aujourd'hui, ni bien, ni mal... un peu à l'envers, comme ces photos prises avec les enfants, tous les 3 couchés par terre... cela fait un moment déjà que je le sais, je ne resterai pas prof, ce n'est pas possible... ce n'est pas le fait d'enseigner qui ne me plaît pas, je pense même que ça, je le fais pas trop mal, j'aime parler aux élèves de ces textes qui bouleversent parfois une existence, j'aime leur expliquer l'importance de "bien parler sa langue", d'en connaître les secrets, les particularités, les origines... j'aime mes classes, j'aime cette relation aux élèves qui se construit à force de travail, de respect, d'amour sans doute aussi... je m'attache à chacun d'eux, même aux pires... d'ailleurs pour moi, ce métier n'a de sens que dans ce lien, cet échange. Alors oui, pour tout ça, je pourrais continuer d'enseigner probablement, jusqu'à ce que je me sente usée par la répétition des programmes, des réformes, jusqu'à ce que ce lien disparaisse, jusqu'à ce que je ne sache plus le faire exister... Je pourrais alors tirer ma révérence et demander à partir plus tôt que d'autres, plus tôt qu'on l'exige, dans la dignité qu'il peut alors rester à un professeur qui fait le choix de ne plus continuer après des années de bons et loyaux services... Seulement voilà, moi je ne la ressens pas cette "loyauté" que je devrais éprouver pour ceux qui nous gouvernent, qu'importent leurs partis, leurs grandes idées, leurs réformes, je ne suis pas disciplinée comme le "bon fonctionnaire", je n'accepte pas le système tel qu'il est, tel qu'il perdure, je ne me sens pas pleine de compassion, pleine d'empathie pour mes collègues qui pour certains souffrent dans leur relation aux élèves, il faudrait pourtant, ce serait mieux, ce serait plus simple de ne pas avoir ce ressenti, de ne pas être dégoutée devant l'hypocrisie et le manque d'honnêteté de notre profession, devant cette acceptation de la situation telle qu'elle est parce que c'est vrai, changer les choses, ce serait aussi accepter de changer soi-même, de voir l'école d'aujourd'hui différemment, accepter de réformer véritablement les rythmes, prendre la décision d'enseigner l'essentiel, ou de ne pas enseigner le saint programme à un élève qui ne sait ni lire, ni écrire... Je ne resterai pas prof, ce n'est pas possible, je ne veux pas faire partie de cette fumisterie... je ne suis pas meilleure, ce n'est pas ça, je ne connais pas toutes les réponses, je sais seulement que quand arrive la pause, j'ai mal au bide, je sais que je ne suis pas à ma place... un peu à l'envers comme ces photos prises avec mes enfants, tous les 3 couchés par terre...
Toutes ces valeurs auxquelles je crois très fort et qui disparaissent si vite en ce moment au profit des notes, des exigences parentales et autres réjouissances ministérielles...
j'ai bien hâte de voir ce que tu vas faire de ta nouvelle liberté !! Profite en tous cas !!
L'enseignement manque de profs qui aiment leur métier et qui savent transmettre leur passion. Que dire des jeunes qui rentrent du collège en disant s'y ennuyer et ne rien apprendre!
Y aller aussi avec une boule dans le ventre car seuls les résultats comptent pour leurs profs qui eux aussi n'aiment pas aller travailler.
Alors reste la maison où il faut répondre aux questionnements: est-ce qu'au lycée je vais enfin apprendre quelque chose? Pourquoi aller en classe ?
Si c'est dur pour un adulte, cela l'est encore plus pour un jeune intelligent à qui rien n'est proposé et qui se voit aussi taxé d'intello par ses profs parce qu'il veut seulement apprendre.
J'espère que le système allemand est mieux conçu que celui qui est proposé à nos enfants.
Bon courage?
Moi je suis juste une maman, mais donc enseignante à ma manière... mes enfants n'ont que 6 et 4 ans, mais j'essaie déjà de leur transmettre que l'important n'est pas dans la note, mais dans le plaisir qu'on a eu à apprendre, la fierté de savoir faire, la confiance en soi qu'on y gagne, l'envie de pouvoir plus tard, mener la vie que nous plait car nous aurons fait les efforts qu'il faut pour !
J'espère qu'ils croiseront dans leur cursus, des profs comme toi, qui ne focalisent pas sur le programme et les notes mais sur l'épanouissement de l'élève et le plaisir de les voir progresser.
Fais le tant que tu en as la force, le plus longtemps possible j'espère, car visiblement les enfants auraient à y perdre que tu t'en ailles
Mais si un jour tu capitules, que la boule au ventre est trop présente je ne te jetterai pas la pierre, tu dois aussi penser à toi, à tes enfants, ta famille, à votre équilibre
Comme toi, parfois j'ai envie de changer, mais comme mamanclaire "je ne sais rien faire d'autre et je n'ai envie de rien d'autre".
Et puis moi, mon rêve d'enfant c'est de sauver le monde, pour l'instant, c'est la chose qui me le permet...
J'espère que tu relèveras un peu les bras ou que tu trouveras une jolie branche où te poser dans le sens que tu veux.
Si jamais tu as un peu de temps entre deux, es tu OK pour une petite commande de petits souliers ? je n'en ai plus qu'une paire à la boutique !
Bref, je comprends et je vais suivre pour voir si tu t'arrêtes bientôt ou si comme moi c'est un projet à plus long terme.